L’ONUCD publie son troisième rapport sur la traite des personnes
En décembre dernier, l’Office des nations unies contre la drogue et le crime (ONUCD) publiait son troisième rapport sur la traite des personnes depuis sa résolution en 2010 de s’attaquer à ce problème d’ordre mondial. Le rapport en question s’appuie sur des données collectées principalement entre 2012 et 2014 se rapportant à 136 pays. Évidemment, comme tous les pays n’en sont pas au même niveau d’action pour contrer ce problème, les données recueillies sont partielles et ne reflètent pas l’ampleur du phénomène.
La traite des personnes est définie par l’ONU comme « le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou à d’autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages, pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation. L’exploitation comprend, au minimum, l’exploitation de la prostitution d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude ou le prélèvement d’organes ». (traduction tirée de l’article Quelle est l’ampleur de la traite des personnes dans le monde? La réponse en carte).
Faits saillants du rapport :
- En 2014, les femmes représentaient 51% des victimes de la traite, les hommes 21%, les filles 20%, et les garçons 8%.
- Bien que les femmes représentent encore la majorité des victimes de la traite, on constate depuis dix ans une augmentation de la proportion d’hommes et d’enfants parmi les victimes. Ceci peut notamment s’expliquer par une augmentation significative de la traite à des fins de travail forcé. En effet, les hommes représentent 63% de ces victimes.
- Bien que les fins de la traite diffèrent d’une région à l’autre, l’exploitation sexuelle et le travail forcé demeurent les principales finalités. Le rapport révèle également que la traite à des fins de mariage forcé semble devenir une tendance de plus en plus répandue.
- On observe des liens entre les flux migratoires et le trafic transfrontalier. On peut donc avancer que le resserrement des critères d’immigration augmente la vulnérabilité des migrantes et migrants au trafic transfrontalier, par le recours à des passeurs.
- Les conflits armés engendrent des conditions favorables à la traite : du recrutement d’enfants soldats, d’esclaves sexuels ou domestiques pour répondre aux besoins des groupes armées au trafic transfrontalier des réfugié.e.s qui fuient désespérément leur foyer.
- Bien que le nombre de pays ayant adopté des législations visant à criminaliser les différentes formes de traite humaine ait significativement augmenté dans la dernière décennie, le nombre de convictions en lien avec celle-ci reste assez bas.
En ce qui concerne le Canada :
- Le nombre de victimes de la traite détectées ait passé de 51 en 2012 à 110 en 2014. Cela ne signifie pas nécessairement que le phénomène ait pris de l’ampleur. Les autorités peuvent également avoir investi davantage de ressources ou avoir développé de nouvelles compétences pour détecter ces cas.
- La traite à des fins d’exploitation sexuelle reste la forme de traite la plus importante.
- La traite interne, c’est-à-dire à l’intérieur de nos frontières, représente 88% des cas relevés.
- Si le nombre de personnes poursuivies pour traite humaine a augmenté entre 2012 et 2014, passant de 48 à 117, le nombre de personnes condamnées pour de tels motifs a quant à lui diminué au cours de ces mêmes années, passant de 16 à 9.
Ce rapport pourrait être l’occasion de se questionner sur le travail accompli sur cet enjeu dans les dernières années au Québec et au Canada. En 2012 sortait un rapport de recherche, La traite des femmes à des fins d’exploitation sexuelle : entre le déni et l’invisibilité, auquel avait notamment participé la CLES, le RQCALACS et le CATHII. Ce rapport identifiait les principaux facteurs de la traite à des fins d’exploitation sexuelle, en plus de soumettre des recommandations afin de contrer ce problème. Cinq ans plus tard, il serait pertinent de revenir sur ces recommandations et d’évaluer où nous en sommes. Venez en discuter ici!